Rechercher dans ce blog

samedi 25 septembre 2010

Chronique d'une journée ordinaire - suite

10h40, la récréation s'est un peu prolongée : Madirlo m'interroge sur l'avenir de Mo... Doit-on vraiment poursuivre l'expérience, alors qu'il fait fi de son contrat dès les premières minutes ? Doit-on laisser Ham s'engloutir dans cette relation destructurante ? Doit-on laisser la classe se déliter davantage, alors que, vraisemblablement, Mo n'embraye pas, même quelques instants, dans une autre direction ?

Nous rentrons en classe. Obtenir le calme à cette fin prend déjà plusieurs minutes. J'envoie Zozo chercher son T-shirt, laissé sur la cour : on n'entre pas en classe en "marcel". Les minutes filent et il ne revient pas : il faut prévenir quelqu'un, savoir où il se trouve ; je ne peux pas laisser les autres...
Heureusement, il réapparait. Se rappeler de ne pas l'envoyer seul en "mission"...
Nouvelle colère de Al à qui j'ai encore refusé une faveur inopportune (je le fais exprès ?). Nouveaux ricanements de Zozo. Nouvel avertissement, tout en remettant fermement Zozo face à sa table.
Troisième victoire de la journée : à nouveau, Al prend sur lui et se joint à nous, participe au cours de conjugaison, reprend pied.

11h15 : Petit entraînement de conjugaison, puis synthèse écrite dans notre "cahier mémoire". C'est le moment que choisit Doudou pour s'effondrer. Je connais ses découragements. Je tente de le remettre en route, mais pour l'instant, la communication est impossible. Je repasserai plus tard pour une autre tentative. Doudou est orphelin de père et de mère. Il est gravement malade. Il porte lourd. On ne peut pas trop tirer sur la corde...

11h45, ça sonne, mais ne sortent que ceux qui se sont mis au travail suffisamment vite pour avoir fini leur copie. Les autres restent et terminent. Je négocie avec certains, pour qui l'écriture est un calvaire (dyslexiques...).
J'en profite pour avoir un entretien avec Mar : il a eu une altercation avant d'entrer en classe avec Jorja, l'a poussé dans les pissotières puis l'a tappé. Petit débriefing sur la situation, à froid. Je lui décris la spirale de la violence et cherche à lui apprendre comment la dégoupiller...

12h00, j'aperçois le "cahier mémoire" de Doudou, abandonné sur sa table : son propriétaire a filé sans demander son reste. Le cahier est lacéré : le protège-cahier est fichu, l'illustration de couverture qui se trouve en-dessous est déchirée et la leçon n'est pas copiée... Aïe ! J'appelle Doudou sur la cour. Il vient avec un air piteux, un gentil sourire et une tête d'ange.

Je prends le temps de parler en tête-à-tête avec lui : il m'avoue sa colère. Pas contre moi. Pas contre son cahier. Contre lui-même, parce qu'il n'a rien compris, parce que c'est trop dur...
Je lui réexplique toute la leçon du matin, avec des mots simples et imagés. C'est bon ? C'est bon. Et la leçon, tu peux la copier ? J'sais pas... Regarde : la première phrase, elle se termine là. Tu peux ? Oui. Et la seconde, ici ? Oui. Et l'exemple en-dessous ? J'sais pas. Bon, va pour les deux premières phrases, après c'est toi qui vois.
Il a copié sans soucis. La tempête était passée.

Il est 12h25, et je n'ai pas encore eu le temps de voir Monanciennemoitié, en visite pour le déjeuner...

12h30, repas en équipe, comme d'hab. On raconte nos guerres et nos victoires...

13h00, une surveillante de cour ouvre à la volée la porte de la salle des maîtres pour annoncer qu'il y a une violente bagarre qu'elle n'arrive pas à gérer. Devine... C'est Mo et un élève de CM2. Il faut s'y mettre à deux pour les séparer. Le temps de cantine a été infecte.

13h15, je conviens avec Madirlo qu'il faut statuer dans l'urgence sur le cas de Mo. Je prends donc sur le temps de soutien pour téléphoner à Mamoitié et avoir son avis sur la question. Puis interroger Notrepsy, qui a justement eu un entretien avec Mo le matin même.
Cette dernière est catégorique : cet enfant relève indubitablement d'un internat éducatif et elle s'étonne que les services sociaux l'aient orienté vers Notrécole. Justement, l'assistante sociale en charge de son cas doit passer à 14h pour faire le point avec Madirlo sur les enfants de Notrécole qu'elle suit.

14h00, je rencontre l'assistante sociale, à qui Madirlo a déjà exposé la situation. Je lui dis nos doutes, sachant qu'un contrat sur trois semaines avait été préparé : sommes-nous cohérents en l'excluant définitivement après une seule journée ? La séparation ne risque-t-elle pas d'être destructrice pour Mo ? Je transmets là les interrogations que je partage avec Mamoitié : nous sommes prêtes à en baver des ronds de chapeaux quelques jours encore, si c'est mieux pour Mo, pour préparer son départ...
L'assistante sociale m'arrête : Notrécole était une carte que les services sociaux ont jouée. Les résultats ne sont pas là et ce, dès le premier jour. Ce n'est donc pas la bonne adresse pour Mo, inutile de tergiverser. Mieux vaut agir vite, et qu'il perçoive nettement qu'il a rencontré un mur !
Soit.

Je ne suis pas encore rentrée en classe pour l'aprèm...
Les CE2 attendent en ordre dispersé devant la porte. Des disputes se forment, il faut agir vite avant que ça dégénère.
Suite demain.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Heureusement que tu nous préviens : "journée ORDINAIRE!!!!
j'aime bien l'image du chapiteau.... j'imagine les fauves et leur dresseuse!
bon courage et bisous à toi.

yann frat a dit…

Oui un bien bel article qui vaudrait le coup de tourner tiens...
Sinon que fait ton ange gardien, il dort ou quoi?

"Le temps de cantine a été infecte"

??!!!???

(mouahaha j'adore faire ça, c'est mon coté pervers dyslexique qui ressort ;))) )

amicalement et repose toi bien ce week-end !

yann