Cher Ami Lecteur !
Tu as des enfants ?
Moi, j'en ai. Cinq.
Sur ces cinq, je n'en ai pondu personnellement que trois.
Ce qui me fait deux beaux-enfants et trois enfants assez beaux aussi.
Sache, Ami Lecteur, si l'expérience ne te l'a pas déjà appris, qu'à la naissance de son premier, on ne devient pas parent de façon monolithique.
On devient d'abord parent de nourrisson, aux cernes marquées, aux sourires extatiques, aux conversations approfondies et passionnées sur la meilleure marque de tétine ou la technologie avancée des couches culottes.
C'est le palier 1, une période durant laquelle on a tendance à saouler tout le monde avec un seul et unique sujet : le fruit de ses entrailles, la chair de sa chair, son petit si beau, si intelligent, si précoce et si envahissant !
Puis l'enfant entre en collectivité : chez la nounou, à la crèche ou, plus tardivement à l'école maternelle.
C'est le palier 2. On affronte le regard des professionnels, en craignant d'être trop hâtivement jugé comme mauvais parent.
Mon enfant pleure lorsque je le dépose, je prends du temps pour le consoler : mauvais parent qui n'arrive pas à se détacher de son gosse alors que, c'est bien connu, il va cesser de couiner aussitôt son géniteur disparu.
Mon enfant pleure lorsque je le dépose, je m'empresse de le confier au responsable pour ne pas faire durer le supplice : mauvais parent qui se débarrasse du problème au lieu de prendre le temps d'expliquer au morveux la bonne journée qu'il va passer là.
Ce stade dure jusqu'à ce qu'on finisse pas comprendre que, quoiqu'on fasse, on peut tout penser de vous : l'important étant de suivre son bon sens et d'être logique avec soi-même !
Ensuite, le marmot entre au CP et on devient parent d'élève d'école élémentaire. C'est le palier 3.
On apprend à parler aux enseignants en essayant de ne pas les froisser tout en avançant ses pions pour que son cher ange soit le mieux compris possible par la maîtresse qui passe tant de temps avec lui.
On gère les premières réussites, les premiers échecs, les premières déceptions, les histoires entre copains, les carnets de notes... et on se replonge, pour beaucoup, dans sa propre scolarité.
C'est une période où on arrive encore à être assez proche du monde scolaire, même si on a été relégué sur le trottoir à la sortie des classes (plus question de pénétrer dans l'établissement après la maternelle !).
Vient alors le palier 4, l'entrée au collège : votre enfant tout mignon tout rose se métamorphose petit à petit en ado.
Ooooh, timidement au début. Il s'essaye, se cherche un look, multiplie les potes, se constitue tant bien que mal une bande, range de moins en moins : le bord*el s'installe. Excuse-moi, Ami Lecteur : il n'y a pas d'autre mot pour désigner le grand fouillis permanent qui, non seulement envahit la chambre du Petit, mais de jour en jour grignote sur l'espace vital du reste de la famille.
Tu retrouves des grandes pompes et des chaussettes odorantes un peu partout.
Une bouteille de Perr*ier près de la télé ("Oui Maman ! J'ai fait mes devoirs !").
Et jusqu'à un paquet vide de chips à côté de ton propre lit.
A ce stade, tu peux te dire, sans l'ombre d'une hésitation que le palier 4 est indéniablement validé !
Est-ce une occasion de se réjouir ?
Sans doute, puisque chaque jour gagné est un jour de moins qui te sépare de la glorieuse période où tu pourras te dire que ton bébé est devenu, presque en un claquement de doigts, un jeune adulte.
Période bénie où il est censé se prendre en charge, laver son linge, subvenir plus ou moins à ses besoins et - éventuellement (on peut doit rêver) - te donner un coup de main à l'occasion...
Mais bon, étant donné que je n'en suis qu'au coeur du fameux palier 4, je n'ose m'aventurer à te parler des paliers suivants.
Pour ça, il faudra encore patienter quelques temps, Ami Lecteur : bien que mes beaux-enfants m'aient donné un avant-goût de la suite des événements, je ne puis encore parler en experte.
:o)